La Caisse Patriotique de Lille.

1791-1792.

 

La Caisse patriotique, figurée par une femme vêtue à la romaine, s'appuie de la main droite sur un coffre ouvert et regorgeant de sacs d'argent et de billets sur le devant duquel sont gravés ces mots " Bon pour 5 S. de France.

Elle tient à droite une branche de chêne et à gauche une pique surmontée du bonnet phrygien. Sa tête est entourée d'étoiles d'où partent de puissants rayons qui semblent refouler les nuages.

Sous la gravure: Caisse patriotique de Lille No ...

 

La Caisse patriotique et la numismatique

D'après Vanhende.

On a émis des bons de trois valeurs: 30 sols, 10 sols et 5 sols.

Pour chacun des deux premières, il y a deux séries: l'une aux caractères d'écriture majuscule anglaise, l'autre au grand romain. Les Bons de 5 sols ont les deux mêmes séries et une troisième 2A, 2B etc ...Ils sont tous revêtus de la griffe du caissier Cambier (autrefois commis du trésorier de la ville; puis de 1775 à 1790 du bureau d'administration du collège, enfin attaché en 1790 à la cantine des eaux de vie) qui les signa au dos dès leur rentrée à la caisse, quand on en eut trouvé de faux en circulation.

Mr. Gentil possède deux épreuves, l'une en parchemin, l'autre en papier, d'un projet de bon de 5 sols de France, gravé en taille douce. S'il eût été adopté, nous aurions eu le plus beau des Bons de commune du Royaume.

Il était probablement destiné à éviter les contrefaçons devenues nombreuses, mais la chûte de la Caisse en aura précédé la mise en circulation.

Description des Bons.

Bons de trente sols:

payable au porteur par la Caisse patriotique de Lille, en échange d'assignats de 200 et 300 livres.

Pour les Actionnaires: signé Cambier caissier.

Dans un cartouche "30 sols" Au-dessus "C" lettre de la série et le numéro. Au centre le timbre sec de la Caisse patriotique gravé par Durig (ce timbre représente une femme debout, tenant des fleurs, et de l'autre un marteau, dans le champ cinq étoiles et une branche de chêne, autour cette légende: Caisse patriotique de Lille. Dans le haut de l'encadrement "Création du 29 Août 1791" Papier imprimé en rouge.

Bons de dix sols:

... ... en échange d'assignats de 70 à 100 livres.

Dans un cartouche "10 sols" Papier imprimé en vert.

Bons de 5 sols:

... ... en échange d'assignats de 50 à 70 livres.

Dans un cartouche "5 sols" Papier imprimé en noir.

Un simple cabaretier lillois, imagina de mettre aussi en circulation des bons de confiance en son propre nom. Ils portaient dans une vignette:

Mahieu, cabaretier "au Funquereau" rue des Vieux hommes à Lille.

Bon pour un sou ou Bon pour deux sous. Papier imprimé en noir.

 

Les assignats, leur naissance*

Ce qu'il y avait de plus difficile pour la Révolution, c'est qu'elle devait se frayer le chemin au milieu de circonstances économiques terribles. La banqueroute de l'Etat restait suspendue sur la tête de ceux qui avaient entrepris de gouverner la France.

Le déficit de la nation avait été une des causes qui forcèrent la Royauté à faire les premières concessions constitutionnelles, et ce même déficit pesa pendant toutr la Révolution comme un cauchemar.

Pour éviter la banqueroute fin 1789, Talleyrand proposa de prendre possession de tous les biens d'Eglise au nom de l'Etat, de les vendre et de payer le Clergé comme des salariés (1.200 livres par an plus le logement, pour chaque curé).

Les revenus de l'Eglise étaient évalués à 120 millions pour les dîmes, à 80 millions pour les revenus des propriétés diverses (dont la valeur était estimée à plus de 2 milliards) et 30 millions de contribution de l'Etat. Soit au total 230 millions par an.

Le Trésor était vide, les impôts ne rentraient plus. Un emprunt de 30 millions le 9 Août 1789 fut un échec, un autre de 80 millions le 27 Août donna très peu. Une contribution extraordinaire du quart du revenu fut votée le 26 Septembre, cet impôt fut englouti dans le gouffre des intérêts des emprunts anciens.

Le 29 Décembre l'administration des biens du Clergé était tranférée dans les Départements qui devaient mettre en vente 400 millions de ces biens.

On décida d'émettre des assignats à cours forcé dont la valeur serait garantie par les biens nationaux confisqués au Clergé, ces assignats seraient remboursés, au fur et à mesure que la vente de ces biens ferait rentrer l'argent.

On décida par les Décrets des 19 et 21 Décembre de créer des assignats en coupures de 1.000 livres donnant un intérêt de 5%, ces coupures étaient un genre de bons du Trésor, destinées à payer les dettes de l'Etat. Les coupures seraient échangeables contre des biens mis en vente par les administrations départementales. L'émission devait-être de 400 millions.

Développement des assignats et

abaissement de leur valeur nominale.

En Avril 1790 les 400 millions créés en Décembre furent divisés en coupures de 1.000 - 300 et 200 livres. Les 800 millions émis en Septembre 1790 furent divisés en coupures de 100 et 50 livres.

Comme il n'y avait plus de monnaie l'Assemblée décida le 6 Mai 1791 d'émettre 100 millions de coupures de 5 livres qui circulèrent à partir de Juillet, mais déjà le 19 Juin on avait décidé d'en émettre pour 600 millions.

L'arrivée des assignats de 5 livres toucha directement le plus grand nombre de citoyens et leur dévaluation mécontenta toute la Nation.

Avec retard, une nouvelle émission de 300 millions eut lieu le 17 Décembre 1791 en coupures de 25 - 10 et 5 livres.

En résumé: De 1790 à 1796 il y eut pour plus de 45 milliards d'émission qui perdirent jusqu'à 97% de leur valeur, de plus il y eut de nombreux faux assignats,tant français qu'anglais.

 

Contexte politique et économique

des années 1791-1792.

Année 1791  
Janvier Les Autrichiens occupent Liège, retour de l'Evêque.
Mars Suppression des corporations, jurandes et maîtrises.
  Première expérience du télégraphe de Chappe.
  L'argenterie inutile du clergé doit-être envoyée aux Hôtels de monnaie. Suppression de la Ferme générale.
  Emeute à Douai, Nicolon marchand de grain et Derbaix imprimeur des affiches du Département sont pendus à la lanterne.
Avril La foule empêche le Roi d'aller faire ses Pâques à St Cloud où se trouve un curé non jureur.
  Grèves dans le Nord pour les salaires.
  Bouchette, Député du Nord, écrit "La ville de Lille est dans un grand embarras, elle est chargée de 1.900.000 livres d'intérêts à payer tous les ans, et elle n'a pas un sol depuis la suppression des octrois sur les boissons et elle est absolument sans ressources.
Mai Création des assignats de 5 livres.
Juin Loi Le Chapelier: L'anéantissement de toutes les espèces de corporations des citoyens de même état et profession, étant une des bases fondamentales de la Constitution française, il est défendu de les rétablir de fait etc ...
  Proclamation de la liberté industrielle.
  Agriculture: Les propriétaires sont libres de varier à leur gré, la culture et l'exploitation de leurs terres, de conserver à leur gré leurs récoltes et de disposer de toutes leurs productions;
  Emission de 600 millions d'assignats.
  Le 20 du mois: fuite du Roi et arrestation à Varennes.
Juillet Affaire du Champ de Mars à Paris: La Garde nationale s'oppose aux manifestants qui demandent l'instauration de la République.
  Bergues: Travaux aux fortifications, Bouchette écrit "l'entrepreneur n'ayant que des assignats et pas d'argent, n'a pu faire travailler. J'ai répliqué que c'était son affaire et que s'il était dans le cas de perdre sur l'échange des assignats, il pouvait faire des représentations et solliciter d'être indemnisé, mais que cela ne l'autorisait pas à suspendre les travaux"
  Le Clergé: Bouchette écrit "C'est bien d'avoir fermé les églises des couvents, mais la chose n'est faîte qu'à moitié,puisque leurs cloches peuvent encore sonner. Il n'y avait qu'à oter les cordes et les battants, et tant que cela ne sera pas fait, il y aura risque de tumulte.
Septembre Le Roi prête serment à la Constitution.
Octobre Ouverture de l'Assemblée législative.
Novembre Assignats en circulation: 1.400 millions.
Décembre Assignats en circulation: 1.600 millions
   
Année 1792  
Janvier Décision d'émettre de assignats de moins de 5 livres.
  Emeutes à Paris, en Haute Garonne, en Flandre et en Artois
  En numéraire les assignats perdent 35% de leur valeur.
Février Troubles en France, pénurie de grain, rareté du numéraire et des subsistances.
  Confiscation des biens des émigrés. Alliance Austro-Prussienne. Décret contre les faussaires.
Mars Troubles en France.
Avril 1.650 millions d'assignats en service.
  Décret pour la fabrication de monnaie avec le métal des cloches.
  Déclaration de la guerre à l'Empereur d'Autriche.
  Il faut 150 livres d'assignats pour 100 livres en numéraire.
  Offensive autrichienne dans le Nord.
  Le 28 le général Dillon est tué par la foule, à Lille. Le 29 le curé de La Madeleine est tué à son tour.
  Emission de 300 millions d'assignats.
Août Les Tuileries sont attaquées, le Roi est suspendu, La famille royale est conduite à la prison du Temple. La France est envahie.
  Création des assignats de 15 et 10 sous.
  L'Assemblée considère le transport des coupures d'assignats de jour en jour plus pressant. Il y a urgence,car il y aura embarras de faire voiturer de grosses sommes de petites valeurs.
Septembre Capitulation de Verdun. Du 2 au 5, massacre des prisonniers dans les prisons de Paris.
  Réquisition de tous les objet cultuels en or et en argent.
  Le 20 victoire de Valmy. Le 21 instauration de la République.
  Du 23 Septembre au 7 Octobre, siège de Lille.
Octobre Création de 400 millions d'assignats.
Novembre Le 6 victoire de Jemmapes.
  Le 15 l'abbé Grégoire demande la mise en jugement du Roi.
  Prise de Liège, prise d'Anvers.
Décembre Le 3: Décret déférant Louis XVI à la justice.

Total des émissions: 2,8 milliards.

 

La Caisse patriotique de Lille.

Conséquences des événements politiques et économiques de ces années critiques

La disparition du numéraire et l'absence de petites coupures rendent impossible le réglement du travail des ouvriers et des opérations quotidiennes du petit commerce, ces difficultés rendent la population nerveuse, de plus il y a une grande quantité de soldats dans notre ville frontière, il n'ont pas de monnaie pour se distraire en ville.

Des commerçants lillois se réunissent pour trouver une solution! Créer une Caisse de petite monnaie contre des assignats. Ce n'est pas une nouveauté, on avait déjà émis des billets de confiance à Senlis en Février, à Lyon et à Amiens en Mai.

Ces citoyens écrivent en Juin au Procureur général d'Amiens afin de savoir comment on peut relancer l'industrie et restaurer le commerce local.

Le procureur répond le 10 Juin:

A Amiens il y a une Caisse d'échange des assignats contre des Billets de cette caisse, la Commune est, seule, chargée de l'administration, des frais et des risques. Il y a des billets de 10 _ 20 _ 40 et 100 sols. Les entrepreneurs de manufacture et les chefs d'ateliers présentent leurs assignats à la Caisse et y reçoivent, de celle-ci, des Billets en proportion de leurs besoins.

Après la reception de cette lettre les commerçants écrivent au Conseil général de la Commune de Lille:

"L'inaction des fabriques est peut-être le plus grand malheur que cette ville puisse jamais avoir à redouter, puisque les fabriques sont l'unique ressource de plus de la moitié de ses habitants. Le malheur paraîtra néanmoins très prochain si l'on considère que la rareté du numéraire force le fabricant à acheter à grand prix, les espèces nécessaires pour payer les ouvriers et pour se procurer en détail les matières premières, car il est clair que si l'argent monnayé continue d'absorber et au-delà, le bénéfice que fait communément le fabricant, il finira par s'abstenir de faire travailler. Effrayés des conséquences inévitables de cette cessation de travail, et informés de ce que d'autres villes de fabriques ont établi pour suppléer à cette rareté du numéraire, nous avons pris le parti d'écrire à l'une de ces villes, à Amiens, pour connaître en détail le remède que le Conseil général a cru devoir y apporter.

Nous avons reçu la réponse, ci-jointe, signée du Procureur de la commune, ainsi qu'un exemplaire de la proclamation du-dit Conseil général. Nous nous empressons de vous présenter l'une et l'autre. Persuadés que la ville de Lille se trouvant dans les mêmes circonstances que celles d'Amiens, vous regarderez comme digne de votre sagesse et de votre patriotisme d'adopter un remède semblable ou équivalent.

Nous n'avons trouvé à faire, sur cette proclamation, qu'une seule observation, c'est que l'échange des billets de 100 sous ne devrait pas être borné aux assignats de 200 livres, mais qu'on devrait l'étendre jusqu'aux assignats de 300 livres.

La lettre est signée de près de 180 noms, les signatures sont parfois accompagnées de la profession:

Filtier, boulanger, cabaretier, boucher, bourgeois? me/es-arts, homme de loi, avoué, juge de paix, épicier, orfèvre, carrossier, apothicaire, maréchal, serrurier, horloger, md de vin.

 

La Municipalité de Lille et les problèmes de la petite monnaie en 1791 et 1792.

Année 1791:

2 Juillet, Lettre du Procureur de la commune de Lille au Procureur du Département:

"Comme l'on s'occupait de la Caisse d'échange des petits assignats contre la monnaie de billon, le Corps municipal a reçu par la voix du District, des ordres ultérieurs, entr'autres celui de remettre au Directeur de la Monnaie, tous les petits assignats échangés et de se borner aux 4.000 livres reçues, jusqu'à ce que les autres villes du Département aient été fournies en billon."

25 Juillet, le Décret sur l'émission des petits assignats de 5 livres, avait réglé qu'ils ne pourraient être mis en circulation que lorsqu'il y aurait une Caisse d'échange établie, où chaque porteur pourrait se convertir, sur le champ, en monnaie de billon.

Cependant cette Caisse est encore loin de s'ouvrir à Lille puisque le Directeur de la Monnaie n'a encore fabriqué que pour 4.000 livres et qu'à la fin de la semaine il n'y aura guère que pour 10.000 livres, les petits assignats sont déjà en circulation et l'on se propose de faire demain le prêt des troupes. Le soldat n'ayant point de monnaie pour ses menues dépenses et devant éprouver quelque perte à échanger son assignat, l'emploiera à boire ou à se divertir jusqu'à l'épuisement de sa valeur. Se trouvant moins riche, il sera tenté de vendre son butin et finira par déserter.

Les officiers de la garnison signalent le danger, si les soldats ne peuvent échanger leurs assignats. Il faut de toute urgence établir une Caisse d'échange.

 

Délibérations de la Municipalité.

8 Juillet: Examen et rapport à faire par des Commissaires désignés et la Chambre de commerce, d'un projet, présenté par un certain nombre de citoyens pour l'émission d'un certain nombre de Bons de caisse de petites sommes qui serviraient à échanger les assignats.

15 Juillet: Convocation du Conseil général de la commune le Lundi 18 courant pour aviser sur les conclusions de la requête présentée par un certain nombre de citoyens tendant à former, en cette ville, une Caisse patriotique pour procurer l'échange des assignats contre des petits mandats.

18 Juillet: Ajournement de la question concernant la formation d'une Caisse patriotique.

1er Août: Administration et organisation de la Caisse d'échange d'assignats de 5 livres contre la monnaie de billon pour le prêt des troupes, à la charge du bureau.

9 Août: Voeu à exprimer au Directoire du Département: que les cloches devenues inutiles ou qui le deviendront, dans la ville et le district, ainsi que les pièces d'argenterie déposées au Directoire du District, soient promptement remises à l'Hôtel des monnaies de Lille pour y être fondues et employées à la fabrication des pièces de monnaie.

2 Septembre: Emplacement du ci-devant Bureau des bières sera accordé à une Société pour échanger des assignats de 200 et 300 livres contre des Bons de Caisse de petite monnaie.

11 Septembre: Demande d'approbation par le Corps municipal d'un projet présenté par une Société de citoyens pour l'établissement d'une Caisse servant à l'échange des assignats de 200 livres et 300 livres contre des Bons de caisse.

 

Affiche du 16 Septembre.

Extrait du registre du Corps municipal.

... ... Il a été fait rapport d'une requête présentée par les Actionnaires de la Caisse patriotique de cette ville, pour l'échange des assignats contre des Bons de cette Caisse ...

Il a été résolu de déclarer que le patriotisme et le zéle des entrepreneurs sont dignes de nos éloges, que nous avions déjà manifesté notre opinion sur l'utilité d'un pareil établissement, aussitôt qu'on nous en avait fait la proposition; puisque dès lors, nous avions accordé aux Actionnaires l'usage provisionnel du ci-devant Bureau des bières, pour y tenir celui de la Caisse patriotique, qu'il nous parait que les développements qu'ils ont donnés, depuis, à leurs premiers plans, en ont rendu les avantages plus sensibles pour la classe précieuse mais indigente de nos concitoyens, et plus appropriés aux besoins des fabriques et des manufactures, dont le soutien dépend essentiellement de la facilité de pouvoir payer les ouvriers en monnaie ou en billets de petite valeur; qu'en conséquence nous ne doutons point des bons effets que cette caisse doit opérer dans le commerce.

Waymel Secrétaire greffier.

Affiche du 8 Octobre.

Proclamation du Corps municipal relative à la Caisse patriotique.

Nous voyons avec peine que des mal-intentionnés indisposent les ouvriers et nos autres concitoyens contre les Billets de Caisse patriotique, autrement dits Billets de confiance: ces ennemis du repos public, ne peuvent réussir dans leurs intrigues, qu'en propageant une erreur dangereuse et en faisant croire que l'acceptation de ces billets est forcée. Nous nous hâtons, en conséquence, de détromper nos concitoyens et de les avertir que personne n'est obligé de recevoir les dits billets.

Le présent avertissement ôtant tout pretexte aux murmures, nous déclarons expressément que nous sévirons avec toute l'autorité qui nous est confiée par la Loi, contre tous ceux qui s'ameuteraient, ou se rendraient coupables de quelque voie de fait contraire à la tranquillité publique et aux droits sacrés des propriétés...

Waymel Secrétaire greffier.

11 Octobre Lettre des Actionnaires de la Caisse patriotique, suite à l'affiche du 8 Octobre.

... ...Ils n'ont pas lu, sans une sorte de découragement votre proclamation du 8 courant, promulguée et affichée le même jour, de 5 à 9 heures du soir, ensuite ces affiches arrachées et le contenu interprêté par les malveillants, comme portant que les Bons de la Caisse étaient défendus, tandis que votre proclamation porte textuellement que personne n'est obligé de les prendre.

Les choses dans cet état, que peuvent les Actionnaires?

Désirer que cet établissement ait lieu, puisqu'ils peuvent opposer à tous ceux qui y sont contraires, l'exemple du bien qu'il a procuré indistinctement à toutes les villes de fabriques et autres du Royaume. Que faut-il dans l'état de choses aux Actionnaires, pour parvenir à mettre la Caisse patriotique en pleine activité?

Que la Municipalité annonce au public que la Caisse patriotique offre un avantage, une sûreté incontestable pour les porteurs de bons. Qu'en conséquence la Municipalité engage tant les fournisseurs que les ouvriers à les recevoir en payement, à moins que les uns et les autres ne veuillent s'exposer à se voir incessamment privés de leur détail ou du travail dont le produit est nécessaire à leur subsistance et celle de leur famille.

Affiche du 14 Octobre.

Nouvelle proclamation. En interprêtation de celle du 8 du présent mois.

Par notre proclamation du 8 de ce mois, nous avons marqué notre animadversasion contre les mal-intentionnés et les ennemis du repos public, qui indisposent nos concitoyens contre les Billets de la Caisse patriotique, autrement dit "Bons de confiance" Cette proclamation qui avait seulement pour but d'avertir que l'acceptation de ces billets n'était pas forcée, a néanmoins été mal interprêtée par des gens qui ne connaissent pas les sacrifices que les circonstances peuvent exiger, ou qui ne fondent leurs coupables espérances que sur le malheur public. En conséquence, nous avons résolu de détromper,de nouveau, nos concitoyens en les assurant, comme nous l'avion déjà fait, par notre résolution du 16 Septembre dernier, que le patriotisme et le zéle des entrepreneurs de cette Caisse sont dignes de nos éloges, déclarant que la rareté du numéraire rend l'émission de ces Billets, de jour en jour, plus utile au soutien de nos fabriques, et que les précautions qui ont été prises et mises sous nos yeux, ne doivent laisser aucune inquiétude sur les bons effets de ces Billets de confiance.

C'est pourquoi, nous invitons tous les ouvriers, tous les fournisseurs et tous nos autres concitoyens, à recevoir les dits Billets en payement, leur déclarant qu'ils donneront des preuves honorables de leur civisme, en protégeant un établissement aussi utile.

Déclarant itérativement néanmoins, que l'acceptation des dits-bons n'étant pas forcée, quoiqu'elle soit de la plus grande utilité publique, il ne reste aucun prétexte aux murmures, et que nous regarderons comme mauvais citoyens, que nous punirons même avec sévérité, tous ceux qui se rendraient coupables de quelques excés contraires à la sûreté des personnes et des propriétés.

Waymel Secrétaire greffier.

13 Octobre, Lettre des Commissaires Actionnaires de la Caisse patriotique à la Municipalité.

Nous avons reçu hier soir la lettre que vous nous avez fait adresser, par monsieur le Procureur de la commune, enréponse au mémoire que nous eûmes l'honneur de vous présenter Mardi dernier concernant la Caisse patriotique de Lille.

Cette lettre porte en substance que le Corps municipal avant de statuer sur aucune de nos demandes et de nos offres, désire que nous mettions sous ses yeux, la liste des fournisseurs en tout genre, qui consentent à recevoir en paiement les Bons de la Caisse.

Tels convaincus que nous soyons, Messieurs, de votre zéle à protéger cet établissement, cette demande de votre part nous tenant toujours dans la négative, nous jette de plus en plus dans le découragement où votre proclamation du 8 de ce mois nous a plongés et dont nous avons pris la confiance de vous indiquer le remède par notre mémoire d'observations.

En effet et comment voulez-vous, Messieurs, qu'aujourd'hui nous puissions satisfaire à votre réquisition? Nous avions avant votre proclamation du 8 de ce mois, un bon nombre de fournisseurs que leur patriotisme avait porté à se faire inscrire et un plus grand nombre d'autres qui sans consentir à cette formalité, s'étaient engagés de recevoir et recevaient les Bons de notre Caisse patriotique.

L'interprétation malicieuse qui a été donnée à votre proclamation du 8 a tout détruit, ceux qui avaient fait leur soumission pour vendre contre les Bons de Caisse, ne veulent plus être individuellement connus, ils se réservent uniquement de laisser agir leur patriotisme, lorsqu'ils seront certains que les mal-intentionnés seront seront aussi dans l'impuissance d'effectuer les menaces que ces derniers leur font redouter, menaces que vous n'avez pû ignorer et contre lesquelles, jusqu'à présent il n'a été rien promulgué.

D'après cet exposé tout nous oblige de nous enfermer dans les réquisitions et offres reprises dans notre mémoire du 11 de ce mois et d'attendre de votre sollicitude ce que vous prononcerez sur l'extension d'un établissement qui partout dans le Royaume a reçu des Corps municipaux, encouragement, sauvegarde, protection spéciale et garantie envers le public.

Délibéré en l'Assemblée des Commissaires actionnaires 15 signatures;

 

24 Octobre: Réquisitions à faire aux Commandants de la Garde nationale et des troupes, pour dissiper les attroupements d'ouvriers se plaignant de ce que leurs maîtres les avaient payés en assignats de 5 livres qu'ils ne pouvaient échanger sans perte.

28 Octobre Inscription les Lundi et Mardi des personnes désirant échanger de la monnaie de cuivre contre des assignats de 5 livres qu'ils ne pouvaient échanger sans perte.

2 Novembre: A été faite lecture d'une demande de la Caisse de Bons patriotiques pour obtenir que la Commune veuille se charger d'échanger la monnaie contre des assignats de 5 livres... ...

La matière mise en délibération et ouï le Procureur de la , commune, il a été arrêté que leur demande ne pouvait être accueillie, mais qu'on leur échangera quand il sera possible, une somme de 20 à 25.000 livres d'assignats 5 livres, contre pareille somme d'assignats de plus forte somme, et que même il leur en sera accordé de suite sur cette somme, l'échange de 6.000 livres.

8 Novembre Nouvelle demande de la Caisse patriotique:

Elle demande que pour donner de la considération à leur Caisse, le Corps municipal veuille se charger de l'échange des dits-Bons contre des assignats de 5 livres et que le prix du pain soit taxé d'après les achats de bled payable en assignats. La matière mise en délibération et ouï le Procureur de la Commune, il a été arrêté de ne rien changer ni ajouter à la délibération du 2 novembre.

18 Novembre: Nouvelle méthode pour l'échange des assignats contre de la monnaie de billon.

3 Décembre: Convocation du Conseil général de la Commune sur la demande présentée par les Actionnaires de la Caisse des Bons patriotiques, tendant à obtenir que la Commune se charge de la direction de la Caisse.

5 Décembre: Nomination de Commissaires, pour la protection et la surveillance des Bons de la Caisse patriotique.

9 Décembre: Approbation de l'arrêt concernant la Caisse patriotique.

11 Décembre: Convocation du Conseil général de la commune pour lui faire part des observations de boulangers relatives à la Caisse des Bons patriotiques.

Note de Vanhende: En Décembre, la sympathie de nos édiles pour la Caisse, devient franche et sincère, il font surveiller les opérations par leurs Commissaires et la défendent en Janvier contre diverses réclamations et des bruits répandus par la malveillance.

Année 1792:

16 Janvier: Députation des divers régiments de la garnison venant faire savoir au Corps municipal qu'ils refuseront de recevoir leur paye en assignats de 100 sous, les commerçants voulant augmenter le prix de leurs denrées, pour recevoir les dits assignats.

17 Janvier: Echange par la commune d'une somme de 30.000 livres pour de la monnaie de billon fabriquée à l'Hôtel des monnaies.

18 Janvier: Requête signée de 153 citoyens, réclamant la ponctuelle exécution de l'article V de la déclaration des Droits de l'homme et de deux articles de l'Acte constitutionnel, par Messieurs les Maire et Officiers municipaux et les prie de déclarer par une délibération publiée à son de trompe et affiches es-lieux accoutumés, que la circulation des Billets dits patriotiques ou de confiance, est absolument libre et qu'aucun citoyen ne peut-être forcé d'en recevoir en payement.

20 Janvier: Demande faîte à Messieurs Top et Lagarde (du Département) de bien vouloir donner des ordres pour que la Municipalité reçoive, demain, 4.000 livres de monnaie de billon pour servir à l'échange des assignats de 5 livres distribués aux troupes, pour partie de leur prêt.

2 Mars: Affichage d'un avis touchant le cours des Billets de la Caisse patriotique.

9 mars: Affichage hebdomadaire du montant de la répartition de la monnaie de billon.

29 Mars: Lettre du Général Ruault, Commandant de la Place:

D'après le rapport que M. de Dillon et les Chefs de Corps ont eu l'honneur de vous faire, de la position désastreuse dans laquelle se trouvent les finances de la garnison, en raison de la pénurie de numéraire et de la perte qu'éprouve la masse du linge et chaussures, particulièrement affectée à l'entretien du soldat dont le montant n'est plus payé qu'en assignats, et le 1er Avril étant l'époque où le décompte des trois mois doit s'effectuer, vous eûtes la bonté de nous accorder dans les derniers jours du mois dernier, l'échange d'une somme de 1.200 livres d'assignats en monnaie de billon et de nous faire espèrer que vous voudriez bien nous procurer pour le 1er Avril celle de 2.400 livres, comptant sur cette somme, les Chefs de Corps composant la garnison française de Lille, ont employé jusqu'à ce moment-ci tous les moyens possibles afin de soutenir l'édifice chancelant de leur comptabilité, et ils connaissent trop, Messieurs, l'amour du bien public, dont vous êtes animés pour ne pas espèrer que vous voudrez bien venir au secours de leurs troupes en leur procurant la conversion de 2.400 livres d'assignats en monnaie de billon à raison de 300 livres par bataillon, qui est la réduction à laquelle ils seront restreints pour ne pas abuser de votre bonne volonté, ni des secours que vous devez à vos concitoyens. Car si nous sommes assez heureux pour en être les défenseurs nous ne devons ni ne voudrions en être les oppresseurs.

Je vous serais donc infiniment obligé, Messieurs, de vouloir bien me mander quels jours les quartiers-maîtres de la garnison pourraient se rendre à la Municipalité pour y recevoir la portion de numéraire qui reviendrait à chaque régiment.

Le 24ième Régiment, Le 56ième Régiment, Le 90ième Régiment, Le 1er Régiment de Cavalerie et le Bataillon des volontaires.

30 Mars: Approbation de la demande des Chefs de Corps de la garnison, pour obtenir de l'argent en billon, pour l'échange des assignats qui se donnent aux soldats, pour la partie de la solde servant au linge et à la chaussure.

20 Avril Déclaration de la guerre à l'Empereur d'Autriche.

 

La fin de la Caisse patriotique.

La suppression générale des Caisses patriotiques fut décrétée par la Convention le 8 Novembre 1792. La Caisse de Lille cessa de fonctionner le 31 Décembre.

Le 12 Décembre 1792: Nomination des citoyens Darcy et Burette, Commissaires pour procéder à la vérification des Caisses d'émission des Billets de confiance patriotiques et de secours, en exécution de la Loi.

Convocation du Conseil général de la Commune le 14 courant pour aviser aux moyens de parer aux événements qui pourraient résulter de la rentrée subite desBons de la Caisse patriotique. Voir à l'échange de Billets de confiance contre des assignats.

Le 14 Décembre: Vérification de la Caisse patriotique.

En exécution de l'article 6 et 8 du Décret de la Convention nationale du 17 Novembre dernier.

Nous Eustache Burette et Louis Darcy Officiers municipaux et Antoine Demilly secrétaire, commis de la Municipalité de la ville de Lille, en conséquence de la délibération du 13 de ce mois, nous nous sommes transportés au Bureau des Billets de confiance et patriotiques qu'avait émis jusqu'à ce jour, en cette ville, une Compagnie de citoyens, lequel bureau, elle tenait dans une des pièces de l'Hôtel commun où étant, nous avons fait connaître que d'après la Loi, l'émission de ces billets au porteur prenait fin à compter de ce jour.

Nous avons ensuite, en exécution de l'article 8 du même Décret, procédé à la vérification de la Caisse de la Compagnie en présence des citoyens: Legrand, Hélie, Flamen, Plancq, Baillon, Scheppers, Defosseux et Ledoux, Commissaires de semaine du Bureau et nous avons reconnu:

1 _ Qu'il a été émis des Billets patriotiques au porteur pour une somme de 326.164 livres 10 sous.

2 _ Que le bénéfice fait sur l'émission de ces Billets était de 6.526 livres 10 sous.

3 _ Que dans la Caisse, il s'est trouvé en assignats, une somme de 246.900 livres et en mauvais Bons 44.400 livres.

4 _ Que le caissier avait en Bons patriotiques à émettre pour une somme de 33.568 livres 18 sous, en ce compris des assignats pour l'échange de la Caisse.

5 _ Et que les frais du Bureau et la fabrication ont porté la somme de 7.822 livres 6 sous.

Et ont les Commissaires signé et déclaré qu'il est dû 2.305 livres pour frais de bureau et impression, qu'ils justifieront, au besoin, et par devant qu'il appartiendra, sous réserve par les Actionnaires de la Caisse patriotique de faire tous les frais nécessaires à la liquididation s'il échéoit qu'ils se soient faits à leur charge.

Les dits Commissaires ont ensuite refusé de signer et le tout en est resté en leur possession.

Même date: Convocation du Conseil général de la commune pour aviser aux moyens de parer aux événements qui pourraient résulter de la rentrée subite de Bons de la Caisse patriotique.

Notification aux Administrateurs du Directoire du District, du procès verbal de vérification de la Caisse de confiance et de faire fournir une somme suffisante de coupures d'assignats pour l'échange des Billets ou Bons en émission.

16 Décembre: Nomination d'une commission pour les bureaux d'échange des Bons de Caisse des villes étrangères.

17 Décembre: Invitation au citoyen Cambier, Caissier des Actionnaires de la Caisse patriotique, à convoquer les Commissaires de semaine, demain 18 courant, pour procéder au brûlement des bons de caisse, non en émission ou rentes.

 

Billets de confiance.

Liste des communes du Département du Nord qui ont émis des Billets de confiance, 1791-1792.

Douay Chef-lieu

District d'Avesnes:

Anor: Jacques Meunier Maroilles: commune

Etroeingt: canton Maubeuge commune

Floyon: commune Trélon: Ansiau

District de Bergues:

Bourbourg: commune Gravelines: commune

Dunkerque: commune

District de Cambray:

Cambray: Municipalité (caisse de confiance)

Mazinghien: Municipalité Neuviesly: Municipalité

District de Douay:

Douay: commune Marchiennes: commune

District d'Hazebrouck

Cassel: Municipalité Merville: manufacture

District de Lille:

Lille: Caisse patriotique

Quesnoy: Joseph Baillon

District de Quesnoy:

Landrecy: commune Le Quesnoy: Municipalité

District de Valenciennes

Condé: commune Valenciennes: commune

 

Conseil du District de Lille  15 Décembre 1792

Rentrée des Billets de confiance étrangers.

Sur les observations faîtes par les membres composant le Conseil général de la Commune de Lille, il était urgent de prendre des mesures pour la rentrée des Billets de confiance étrangers que le passage de l'armée sur cette frontière a répandus en grand nombre, tant dans cette ville que dans les bourgs et villages circonvoisins.

Considérant que la loi du 8 Novembre, faisant une distinction entre les Billets de confiance émis par les Corps administratifs ou municipaux, et ceux émis par les Compagnies ou particuliers, laisse à ces derniers le soin de retirer les Billets par eux émis, et charge les Corps administratifs de leur en faciliter les moyens.

Que si à l'aide des dispositions de cette Loi, l'on peut se reposer avec sécurité pour ce qui regarde les Billets émis à Lille, sur la vigilance du Directoire du District pour faciliter les échanges d'une part, et d'autre part sur le patriotisme des Associés qui jusqu'alors n'ont travaillé que pour le bien-être de leurs concitoyens, il n'est pas moins important de procurer aux habitants de cette ville et du District le moyen d'échanger les Billets étrangers dont les circonstances ont nécessité la circulation.

Qu'il est néanmoins des mesures de précaution à prendre relativement aux billets qui seraient suspectés de faux, ou sur la validité desquels on aurait quelques incertitudes,et qu'à cet égard, personne ne peut exiger qu'on lui remette sur le champ la valeur de ces Billets, puisqu'à la rigueur et d'après le prescrit de la Loi, on pourrait renvoyer tous les porteurs à se débarrasser eux-mêmes des Billets qui seraient entre leurs mains; ainsi c'est déjà beaucoup qu'à l'égard des Billets suspectés de faux ou incertains, les Corps administratifs se chargent de tous les frais et embarras du dépôt, envois et correspondance avec les communes étrangères.

Qu'il ne serait pas juste que la commune de Lille fit, elle seule, tous les frais relatifs à une opération qui tend au soulagement de tous les habitants de ce District.

Que l'échange de la main à la main des Billets de confiance étrangers exigeraient une avance de fonds considérable, si les propriétaires, cultivateurs, gens aisés, négociants et chefs d'atelier ne se prêtaient pas à retirer des mains des ouvriers les Billets dont ils sont porteurs et à attendre, pour l'échange des fortes sommes, que les communes étrangères aient envoyé les assignats ou coupures nécessaires pour l'effectuer.

Suivent les douze articles réglant l'organisation des échanges.

 

Dépot des Bons de confiance des villes étrangères.

Lille étant une ville frontière, de nombreus soldats y furent casernés à cette époque, cela explique, en partie, la circulation importante de Bons de confiance venus d'ailleurs.

On a récupéré des Bons de 49 Départements se montant à la somme de 17.704 livres 17 sols 6 deniers.

Répartition des sommes des premiers 20 Départements

Départements Livres sols deniers
Nord 4.568 15 6
Somme 3.841 18  
Aisne 3.156 8 6
Pas de Calais 1.800 18  
Paris 1.075 13  
Seine inférieure 726    
Marne 614 11  
Oise 588    
Ardennes 569    
Calvados 121    
Eure 94 3  
Orne 71 1 6
Aube 58    
Eure et Loire 56 9  
Mayenne 41 15  
Loiret 37    
Rhône et Loire 33    
Gironde 32    
Seine et Oise 29 8  
Meuse 24 15  

 

Les faux assignats.

Exemple d'un rapport de police:

Calais le 12 Octobre 1792.

Voici ce que je viens d'apprendre au sujet d'une fabrication d'assignats sur laquelle j'ai donné des renseignements. C'est toujours à Dieppe que se fera la distribution de cette marchandise désignée par les associés sous le nom de "mousseline" mais ce que je ne sais que de tout à l'heure, c'est que Bède le principal agent est à Ostende avec d'autres, dont j'ignore encore les noms, il parait que les brigands s'entendent avec des gens établis dans cette ville des Pays-Bas, afin de faire passer leurs faux papiers à l'aide de quelques spéculations mercantiles.

La ci-devant baronne X doit-être auprès de Bède car on m'a dit qu'il avait avec lui la femme avec laquelle il était très lié à Paris. Barrington doit-être à Dieppe, Moutaet et Jackson à Londres ou Ostende. Quant à La Roche il est toujours à Paris. Je tacherai d'avoir des éclaircissements ultérieurs en Angleterre, surtout au sujet du graveur.

Bède: Homme de lettres pour qui j'avais traduit un ouvrage intitulé "Histoire de l'Amérique septentrionale" Je m'occupais de ce travail, il recevait tous les jours la même compagnie et j'ai découvert le complot. Bède a 34 ans, mesure 5 pieds, 4 à 5 pouces, fort gros, visage rond, yeux vifs, nez pointu, lèvres défigurées par une cicatrice, cheveux roux et plats.

Jackson: Si connu par ses démêlés au sujet de la succession de la fameuse duchesse de Kingston. Près de 60 ans, porte une queue, front large, gros nez, figure bourgeonnée, pas aussi gros que Bède, de la même taille, a l'air aussi sérieux que l'autre l'est peu.

Moutaet: Intime de Jackson, avec qui il logeait rue Popincourt, plus petit et moins gros, figure déchirée par la petite vérole.

Baronne X: Est à Londres, cette femme ainsi que Moutaet tenait un des plus beaux équipages de Paris, ne vivait que d'une faible pension de la Reine, il lui fallait un supplément de ressources. 36 ans, encore belle, annonce toute l'effronterie du crime. Si elle n'est pas à Dieppe elle est sûrement à Londres. La police la connait.

Dyck: Anglais, est à Boulogne, assassin réfugié en France, escroc, joueur.

Barrington: (parti pour Botany Bay?) Neveu du pair Irlandais, à la mort duquel il aura 50.000 écus de rente, doit-être à Dieppe au port La Barre dans une maison isolée où doivent se transporter "les mousselines"

La Roche: On le croit à Boulogne, je ne jurerais pas qu'il ait trempé dans le complot, mais c'est un fripon, luxurieux, sans fortune, a maison de jeux dans la rue Chabannois. Je crois qu'il s'occupera des moyens de faire passer la mousseline autour de ses tables.

Ryland: A un mal de gorge de famille, son frère a été pendu à Londres pour fausses lettres de change. Tous deux du métier de graveur, s'est chargé de faire graver les planches.

Il y en a d'autres en France et en Angleterre.

____________

Documents recueillis par Jacques VERHASSELT

Retour page Publications

Accueil Numisnord.free.fr