Le Séjour de Joseph CLEMENT,

Electeur de Cologne,

à Lille et à Raismes de 1704 à 1713

 

Présentation de jetons et médailles se rapportant à son sacre par Fenelon en 1707 et au banquet de fraternisation de 1712.

 

Communication faite au musée de Cambrai par le Dr Marcel HERAUD,  le 24 sept. 2000.

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JOSEPH CLEMENT, né le 5 décembre 1671 est le troisième enfant de Ferdinant Marie, duc de Bavière et d'Henriette de Savoie. Du coté maternel, ce prince est un arrière petit-fils d'Henri IV. En qualité de fils cadet, il trouve le titre de Légat du Pape dans son berceau et reçoit dans son adolescence les duchés de Ratisbonne et de Freisingen. Il est élu en 1688 Archevëque de Cologne et devient de ce fait électeur du Saint-empire.

Nommé évêque d'Hildeshein puis prince-évêque de Liège, il se trouve à 23 ans titulaire ou coadjuteur de 5 archevêchés ou evêchés bien qu'il ne soit pas dans les ordres sacrès. Un tel abus était assez courant à l'époque. Le Pape se voyait contraint de le subir vu la situation des églises d'Allemagne confrontées au Lutérianisme.

En 1700, Charles, roi d'espagne, qui n'a pas d'enfants meurt après avoir désigné Philippe d'Anjou, petit fils de Louis XIV, pour lui succéder. Cet événement est à l'origine de la guerre de succession d'Espagne qui mêne le frère ainé de Joseph Clément, Maximilien, à se battre contre les impériaux aux côtés du roi de France dont il a pris le parti. Après quelques victoires, les revers militaires obligent les deux princes à abandonner leurs états de Bavière pour se réfugier en France. Reçu en grande pompe à Lille le 29 juillet 1704, l'Electeur séjournera à l'Hôtel du Gouvernement, situé rue de l'Abbiette, actuelle rue de Tournai.

Les gravures représentant Joseph Clément sont rares mais on peut en voir au musée des Beaux-Arts de Valenciennes un tableau représentant le prince, peint par Vivien. Dans ses mémoires, Saint Simon nous le décrit "cruellement laid, fort bossu par derrière, un peu par devant, mais pas du tout embarrassé de sa personne ni de son discours" . Ses contemporains le jugent bon et généreux. En 1704, joseph Clément à 33 ans. Il bénéficie jusqu'alors d'une dispense d'age mais le droit Canon a prévu pour sa consécration l'age limite de 30 ans. Il a précédemment tenu à Bonn une cour brillante et ses préoccupations sont essentiellement profanes. Il est en pleine crise morale lorsque Rome lui adresse une invitation le pressant de reçevoir au plus vite les ordres sacrés. Avant de répondre à Clément II, il s'adresse à Fenelon, Archevêque de Cambrai, qui exerce comme directeur spirituel une influence considérable sur le prince et parvient à le convertir. Après un an de tergiversations, l'Electeur se décide à prendre les ordres.

La nuit de Noël 1706, l'ordre de prêtrise lui est conféré par l'évêque de Tournai en l'église Saint Maurice de Lille qui conserve de cette ordination plusieurs ornements offerts par le prélat et classés monuments historiques. Il s'agit d'une chasuble et d'un dalmatique du XVIIè siècle décorés de tableaux brodés au fil d'or et représentant la Vierge, l'enfant Jésus et divers saints.

Le 1er janvier 1707, Joseph Clément célébre avec magnificence sa première messe en l'église des Jesuites, l'actuelle église Saint Etienne dans la rue de l'Hopital Militaire. Il est sacré Evêque le 1er mai de la même année avec une pompe extraordinaire par Fenelon en la collégiale Saint Pierre. Les évêques d'Ypres, de Namur, de Liège et de Cologne assistent à la cérémonie en même temps que son fère Maximilien entourés des chevalires de la Toison d'or. Dans son sermon, Fenelon évoque les qualités requises pour un pasteur à l'égard de son troupeau. Les contemporains s'accordent à reconnaître les qualités oratoires de l'illustre prélat dont le discours constitue un chef d'oeuvre de l'éloquence chrétienne.

Le prince de Bavière fait preuve d'une intense activité religieuse durant les deux années qui suivent sin sacre. Il organise des manifestations grandioses pour fêter les moindres sucès militaires et les naissances des fils de sang royal. En une année, il entonne 28 fois le Te Deum ! L'Electeur s'intéresse également aux arts et spécialement au théatre et à la musique. Il organise des concours de tir. Il cherche à distraire le plus possible les lillois qui ont grand besoin de gaité en une période sombre de leur histoire.

L'Electeur manifeste une grande ferveur pour l'archange Michel et il crée une confrérie de Saint MICHEL pour les agonisants, initiative d'avant-garde, qui rappelle le souci de nos contemporains pour entourer les malades et accompagner les mourants. Bien entendu, la préoccupation majeure du prélat est d'aider les agonisants à "faire une bonne mort" en s'associant aux prières de la famille.

L'ennemi se rapproche de Lille en 1708 et le prince entretient de son mieux le moral de la population. Sur l'insistance de Louis XIV, le maréchal de Boufflersd oblige le prince à quitter la ville. Le 2 août, Joseph Clément muni d'un passeport du duc de Maibrough part pour Valenciennes. Il es installé au château de Raismes, il se préoccuppe de rétablir les fêtes religieuses en remettant à l'honneur la procession en l'honneur de Notre Dame du Saint Cordon.

Après la glorieuse mais coûteuse bataille de Malplaquet, la victoire de Denain remportée en juillet 1712 transposrte de joie le prince. Sitôt la paix conclue à Uytecht, en 1713 il regagne Cologne après un exil de 9 ans, 9 mois et 9 jours. Il meurt à Bonn en 1723 après avoir demandé que son corps soit inhumé à Lille. En décembre 1723, les lillois entourés des confrères de Saint Michel accompagnent la dépouille du prélat au couvent des Dominicaines de la rue de Tournai ou il est inhumé. Avec la construction de la gare de Lille, les restes du prélat ont définitivement disparu.

CONCLUSION

L'histoire de Joseph Clément est celle d'un prince que les hasards de la guerre obligent à un exil dans nos provinces de Flandre et du Hainaut. En sa qualité de fils cadet du duc de Bavière, la rêgle veut qu'il embrasse l'état ecclésiastique. Un personnage tient un rôle essentiel dans l'évolution spirituelle de l'Electeur, il s'agit de FENELON, l'une des intelligences les plus originales de ce XXVIIIè siècle. Une fois converti, le prince évêque de Liège fait preuve d'un grand zèle religieux sans négliger d'organiser des fêtes profanes pour divertir une population en proie aux misères de la guerre. L'étude des jetons et médailles frappées à l'occasion du séjour de l'Electeur dans notre région apporte d'utiles renseignements sur l'existence d'un personnage hors série au début du XVIIIè siècle.

Dr Marcel HERAUD,  membre de la SNNF,  24 sept 2000.

ILLUSTRATIONS et COMMENTAIRES:

Jeton de la première messe de Joseph Clément

Jeton du sacre

Médaille du sacre

Médaille du banquet de fraternisation.

 

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